DERNIÈRE MISE À JOUR : 16/05/2024

Maladie à corps de Lewy : qu’est-ce-que c’est ?

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Maladie à corps de Lewy

Après la maladie d’Alzheimer, la maladie à corps de Lewy (MCL) est la deuxième cause d’atteinte démentielle dégénérative chez les sujets âgés. Cette maladie aux multiples symptômes apparaît généralement après 50 ans et touche davantage les hommes. Selon France Alzheimer, près de 250 000 personnes en France sont touchées par cette maladie dont 67 % sont non diagnostiquées. Quels sont les symptômes et les traitements de la maladie à corps de Lewy ? Le Dr Sandrine Tournier, médecin gériatre, répond dans cet article.

Qu’est-ce que la maladie à corps de Lewy ?

La maladie à corps de Lewy (MCL) ou démence à corps de Lewy (DCL) est une maladie neurodégénérative complexe qui touche plusieurs parties du cerveau. Elle affecte principalement les parties liées aux fonctions cognitives et motrices.

La maladie à corps de Lewy (MCL) se caractérise par des dépôts anormaux d’une protéine appelée alpha-synucléine à l’intérieur des neurones. Cette protéine présynaptique aurait un rôle dans l’apprentissage. Les dépôts sont appelés des « corps de Lewy », du nom du neurologue Friedrich Heinrich Lewy, qui les a décrits en premier. Ces inclusions neuronales, qui s’accumulent sous forme d’agrégats de filaments insolubles dans le cytoplasme des neurones corticaux, dérèglent le fonctionnement normal du cerveau, en particulier celui des synapses, entraînant un certain nombre de symptômes dont l’évolution est variable.

Maladie à corps de Lewy, maladie d’Alzheimer, maladie de Parkinson : quelles différences ?

La maladie à corps de Lewy présente de nombreuses similitudes avec la maladie d’Alzheimer et la maladie de Parkinson. En effet, la détérioration cognitive initiale de la démence à corps de Lewy ressemble à une maladie d’Alzheimer. C’est pourquoi il est difficile de les différencier. La maladie à corps de Lewy est d’ailleurs répertoriée comme faisant partie des troubles apparentés à la maladie d’Alzheimer.


On peut néanmoins les différencier par le fait que, dans la MCL, les pertes de mémoire sont généralement secondaires. En effet, les atteintes de la fluence verbale et de la perception visuelle sont au premier plan.

De plus, les corps de Lewy sont également observés dans la maladie de Parkinson, mais cette dernière peut évoluer avec ou sans démence. Lorsqu’elle se déclare, celle-ci apparaît le plus souvent à un stade tardif (plus de 10 ans après l’apparition des troubles moteurs).

Symptômes de la maladie à corps de Lewy

Les symptômes de la DCL sont très variables d’un patient à un autre. Ils comprennent des troubles cognitifs, des fluctuations des fonctions cognitives, des hallucinations, des troubles moteurs, des troubles du sommeil et des troubles psychiatriques.

Des troubles cognitifs

Nous retrouvons :

  • une désorientation temporo-spatiale ;
  • des difficultés à réaliser simultanément plusieurs tâches ;
  • des difficultés à raisonner logiquement ;
  • des troubles de l’attention ;
  • des difficultés à résoudre des problèmes ;
  • des troubles du langage.

Contrairement à la maladie d’Alzheimer, les pertes de mémoire n’arrivent pas forcément au début de la maladie, mais lorsqu’elle évolue. Néanmoins, les troubles de l’attention sont très fréquents au début et peuvent être assimilés à des troubles de la mémoire.

Des fluctuations des fonctions cognitives

Ces fluctuations (changements brusques et imprévisibles) peuvent apparaître du jour au lendemain, varier d’un jour à l’autre, voire au cours d’une même journée. On recense notamment :

  • des troubles de la concentration, de l’attention, de la vigilance et de l’éveil ;
  • des idées confuses, aléatoires, sans logique apparente ;
  • un regard dans le vide ;
  • une somnolence ;
  • une léthargie.

La personne peut passer beaucoup de temps à dormir, sembler léthargique, puis en quelques instants devenir tout l’inverse : alerte, dynamique, lucide et en pleine possession de ses capacités.

Des hallucinations

Au démarrage de la maladie, les hallucinations sont fréquentes, et concernent environ 80 % des malades. Elles sont surtout visuelles mais des hallucinations auditives voire olfactives sont également possibles.

Des troubles moteurs regroupés sous le terme de « syndrome parkinsonien »

Les troubles moteurs suivants peuvent survenir dès les premiers stades de la maladie, avec un diagnostic de maladie de parkinson posé ou plus tardivement :

  • une rigidité musculaire ;
  • des ralentissements ;
  • des tremblements (rares au début) ;
  • des troubles de l’équilibre ;
  • des chutes fréquentes ;
  • une posture et expressions figées ;
  • une réduction de l’intensité de la voix ;
  • des difficultés à avaler (dysphagie).

Des troubles du sommeil

Les troubles du sommeil, notamment paradoxal, sont fréquents et comprennent :

  • de l’agitation et des mouvements violents pouvant entraîner des chutes ;
  • des rêves éveillés, des cauchemars, du somnambulisme.

Des troubles du comportement et de l’humeur

Un changement de comportement peut être signalé par la famille, comme :

  • une humeur dépressive ;
  • une apathie ;
  • de l’anxiété ;
  • des délires, notamment paranoïaques...

Le syndrome de Capgras est un type de délire caractéristique de la maladie à corps de Lewy. La personne croit qu’un de ses proches a été remplacé par un sosie. Elle peut considérer ce sosie comme une personne malveillante et se montrer anxieuse, voire agressive.

Comment poser le diagnostic de maladie à corps de Lewy ?

Le Dr Tournier souligne que le diagnostic de certitude est très difficile en maladie neurodégénérative. La grande variété des manifestations de cette maladie le rend difficile.

Les principaux signes caractéristiques

Le diagnostic repose sur un faisceau de symptômes évocateurs de la maladie. Des caractéristiques spécifiques à la maladie à corps de Lewy sont essentielles au diagnostic. Il peut s’agir de :

  • la fluctuation des troubles cognitifs ;
  • les hallucinations visuelles récurrentes ;
  • un syndrome parkinsonien ;
  • les chutes.

L’interrogatoire complet et détaillé

La première étape consiste en un interrogatoire poussé de l’ensemble de symptômes du patient afin de reconstituer l’histoire de la maladie et surtout l’évolution des symptômes dans le temps. Cette dernière atteste en effet de la présence d’une maladie neurodégénérative.

Le professionnel de santé recherche également les antécédents médicaux de la personne (facteurs de risques cardiovasculaires, antécédents psychiatriques, consommation de toxiques…).

L’examen neurologique


Un examen neurologique clinique est ensuite effectué pour déterminer l’ampleur des troubles moteurs. Des tests d’écriture peuvent être réalisés. La présence d’un syndrome parkinsonien permet d’affiner encore davantage le diagnostic.

Les examens complémentaires

Devant la suspicion de la maladie, le neurologue ou le médecin gériatre vont demander des examens complémentaires afin d’affiner le diagnostic et d’éliminer toute autre cause possible :

  • Le DATscan est un examen d’imagerie qui permet de mesurer la perte de fonction des synapses (le point de contact entre deux neurones) évocatrice de la maladie à corps de Lewy.
  • La polysomnographie vise à identifier des troubles du sommeil. Cet examen consiste à enregistrer plusieurs variables au cours du sommeil : le rythme cardiaque, la respiration, les mouvements musculaires…
  • L’imagerie par résonance magnétique (IRM) permet de distinguer une perte de volume de certaines aires cérébrales caractéristiques de la MCL.

L’existence de troubles du sommeil paradoxal, une intolérance aux neuroleptiques et une diminution du transporteur de la dopamine visible à l’imagerie fonctionnelle associées à une ou plusieurs des caractéristiques principales citées ci-dessus permettent de confirmer le diagnostic d’une maladie à corps de Lewy.

La consultation d’annonce

Une fois le diagnostic posé, le neurologue ou le gériatre réalise une consultation d’annonce. Le Dr Tournier explique que ce temps est essentiel afin d’informer le patient et sa famille des caractéristiques de cette maladie chronique, de son évolution, des traitements à envisager et de la prise en charge médico-sociale. Celle-ci est longue et dédiée au patient et à ses proches, pour qu’ils puissent s’adapter à cette annonce éprouvante et intégrer ces informations complexes.

Traitements maladie à corps de Lewy

À ce jour, il n’existe pas de traitement curatif pour la maladie à corps de Lewy. La prise en charge de la MCL comprend des traitements médicamenteux et des dispositifs d’accompagnement divers.

Les traitements médicamenteux

Les traitements symptomatiques visent à ralentir la progression de la maladie. Ils sont proposés au cas par cas, et peuvent inclure :

  • les inhibiteurs de la cholinestérase (rivastigmine) pour atténuer les troubles cognitifs ;
  • la levodopa pour améliorer les symptômes moteurs comme la marche ;
  • la clozapine, prescrite à petite dose pour réduire les hallucinations et le délire ;
  • les antidépresseurs et les anxiolytiques, en cas de symptômes dépressifs et anxieux, etc.

Ces médicaments sont prescrits avec prudence, en fonction des symptômes de chaque patient. Leur utilisation doit être réévaluée régulièrement, car certains d’entre eux ont des effets secondaires pouvant aggraver les troubles cognitifs.

Les traitements non médicamenteux

Les proches de la personne atteinte d’une maladie à corps de Lewy ont la possibilité de faire appel à divers services pour les aider à prendre en charge les troubles de la personne et gérer les différents actes de la vie quotidienne.

Les équipes spécialisées Alzheimer (ESA)

Les ESA sont des équipes de professionnels formés et spécialisés dans ces pathologies (maladie d’Alzheimer et maladies apparentées). Sur prescription médicale, elles peuvent intervenir au domicile du patient pour l’aider à maintenir son autonomie, stimuler ses capacités, diminuer ses troubles du comportement, mais aussi soutenir et encourager les proches aidants. Les équipes sont composées de psychomotriciens, d’ergothérapeutes et d’assistants de soins en gérontologie.

Les autres dispositifs

D’autres services d’accompagnement à domicile peuvent être mis en place comme l’orthophonie, la kinésithérapie, les soins infirmiers, le soutien des aidants via des associations spécialisées, des accueils de jour… Le Dr Tounier ajoute que des dispositifs comme la musicothérapie peuvent être intéressants pour stimuler la cognition et réduire les troubles du comportement.

Les aides financières

Les personnes atteintes d’une MCL et leurs aidants peuvent bénéficier de certains dispositifs financiers de soutien : l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), l’allocation journalière du proche aidant (AJPA)…

L’hospitalisation

Lorsque toutes ces actions ne fonctionnent pas, notamment quand les troubles du comportement deviennent très perturbateurs, des hospitalisations de courte durée dans des unités spécialisées, telles qu’une unité de vie protégée (UVP), peuvent être nécessaires.

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