DERNIÈRE MISE À JOUR : 04/03/2024

Maladies inflammatoires chroniques de l’Intestin (MICI)

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maladie de Crohn

Les MICI (maladie de Crohn et rectocolite hémorragique) sont des maladies digestives chroniques du jeune adulte. Tout ce qu’il faut savoir avec le Dr Tournier.

Selon les données de l’INSERM et de l’Assurance Maladie, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) concernent 200 000 nouveaux cas par an en France. De plus en plus fréquentes, les MICI constituent un problème de santé majeur. Si elles peuvent survenir à tous les âges, elles se déclarent le plus souvent chez des sujets jeunes, entre l’âge de 20 et 30 ans. 15 % des cas concernent les enfants. Les retentissements de ces maladies chroniques évolutives dont on ne guérit pas sont importants : douleurs physiques, répercussions psychologiques et impact socioprofessionnel. Plus d’explications sur les MICI, leurs symptômes, leurs causes et leurs traitements avec le Dr Sandrine Tournier, médecin gériatre.

Définition : qu’est-ce que les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin ?

Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin regroupent deux pathologies : la maladie de Crohn (MC) et la rectocolite hémorragique (RCH). Ces deux pathologies se caractérisent par des inflammations de la paroi du tube digestif, dues à une dérégulation du système immunitaire intestinal. L’inflammation qui se développe au niveau du tube digestif provoque des lésions tissulaires.

Les MICI évoluent par périodes, sous forme de poussées inflammatoires. Leur durée, leur fréquence et leur intensité sont variables d’un individu à l’autre. Elles sont entrecoupées de périodes de rémission pouvant durer de quelques jours, quelques semaines, voire plusieurs années.

Maladie de Crohn, rectocolite hémorragique : quelles différences ?

Dans la maladie de Crohn, l’inflammation peut toucher n’importe quel segment du tube digestif, allant de la bouche jusqu’à l’anus. Celle-ci est toutefois le plus souvent présente dans l’intestin et touche couramment l’iléon terminal (intestin grêle), avec ou sans atteinte colique. Les lésions sont profondes et peuvent être à l’origine d’occlusions ou de perforations. L’atteinte est discontinue : des segments de muqueuse touchés alternent avec la muqueuse saine.

Dans la rectocolite hémorragique, l’inflammation touche exclusivement la partie basse du rectum et plus ou moins le côlon. L’intestin reste indemne, il n’est jamais touché. La muqueuse est rouge et fragile, avec des micro-ulcérations et/ou du pus. Les saignements sont fréquents et se retrouvent dans les selles. Les lésions sont plus superficielles que dans la maladie de Crohn.

Quels sont les symptômes des MICI ?

Les symptômes des poussées inflammatoires comprennent le plus souvent :

  • des douleurs abdominales semblables à l’appendicite ;
  • des diarrhées fréquentes ;
  • du sang dans les selles ;
  • une perte d’appétit, des nausées et des vomissements ;
  • des atteintes de la région anale (fissure, abcès) éventuellement.

Des signes généraux peuvent s’associer, comme une fatigue et de la fièvre. Les poussées inflammatoires peuvent en outre être très brutales et douloureuses. Dans ce cas, l’hospitalisation est indispensable afin de mettre en place des traitements par voie intraveineuse destinés à gérer les douleurs et une dénutrition éventuelle.

Le Dr Tournier précise que le stress et/ou une mauvaise hygiène de vie peuvent majorer le risque de poussées inflammatoires.

Comment évoluent ces maladies ?

L’évolution des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin peut être différente d’un individu à l’autre. Certaines personnes ont peu de poussées inflammatoires, alors que d’autres en souffrent au quotidien. Leur qualité de vie est alors profondément impactée.

Dans le cas où la maladie évolue et n’est pas prise en charge correctement, les conséquences de cet état inflammatoire chronique combiné à la malabsorption intestinale des aliments peuvent également provoquer :

  • une anémie due à une carence en fer ou en vitamine B12 ;
  • la fuite de graisses dans les selles ;
  • des carences en vitamines ;
  • une dénutrition entraînant un amaigrissement et des œdèmes.

Le Dr Tournier explique que chez certains patients, des signes inflammatoires apparaissent sur d’autres organes (la peau, les yeux, les articulations et les muqueuses de la bouche). Ces manifestations extra-digestives sont les suivantes :

  • L’arthrite : inflammation aiguë ou chronique des articulations des membres (chevilles, genoux, poignets...) ou de la colonne vertébrale.
  • Un psoriasis : inflammation évolutive et chronique de la peau qui apparaît sous forme de poussées de plaques rouges qui desquament.
  • Une uvéite : inflammation de l’intérieur de l’œil potentiellement grave (rougeur et douleur des yeux, baisse de la vision…).
  • Des aphtes buccaux : ulcérations plus ou moins douloureuses de la bouche.

Le Dr Tournier ajoute que plus ces maladies évoluent, plus le risque de complications peut survenir, entravant alors sérieusement la qualité de vie des patients. Ces complications sont :

  • Une sténose digestive : rétrécissement d’une partie de l’intestin en raison de tissu cicatriciel présent dans la paroi intestinale fréquent dans la maladie de Crohn.
  • Des fistules, le plus souvent dans la maladie de Crohn : petits tunnels qui se creusent dans certaines parties de l’intestin se reliant à d’autres parties de l’intestin, à la peau ou à d’autres organes.
  • Des perforations digestives (bien que cela soit plus rare) : trous dans la paroi de l’intestin grêle ou du côlon.
  • Une hypodermite nodulaire : petites boursouflures rouges et douloureuses apparaissant sur les jambes et les avant-bras.
  • Une inflammation des voies biliaires.
  • Des calculs rénaux et/ou une infection des voies urinaires.

À long terme, le risque de cancer colorectal est multiplié jusqu’à 5 fois après 30 ans d’évolution de la maladie. Les risques de cancer de l’intestin sont également multipliés.

Quelles sont les causes des MICI ?

Les origines de ces maladies sont complexes et pas encore totalement élucidées. Ces facteurs favorisants comprennent des facteurs génétiques, immunitaires et environnementaux.

Des facteurs de prédisposition génétique

Les MICI ne sont pas héréditaires, mais de nombreux gènes de susceptibilité (170 gènes identifiés) favorisent leur apparition. Le risque de développer l’une de ces pathologies augmente de 6 à 10 % en cas d’antécédents familiaux. Ainsi, certaines formes du gène NOD2/CARD15 multiplieraient par 40 le risque de développer la maladie de Crohn.

Des facteurs environnementaux et comportementaux

La pollution, le stress chronique, l’alimentation et le tabac pourraient favoriser leur apparition. Le tabac, par exemple, augmente le risque de développer la maladie de Crohn et intensifie les poussées. Toutefois, la nicotine réduirait les risques de développer une rectocolite hémorragique.

Il y a d’ailleurs une nette incidence des MICI dans les pays industrialisés (États-Unis, Europe du Nord-Ouest) en lien avec les facteurs environnementaux. La fréquence d’apparition de ces maladies augmente rapidement dans les pays en voie d’industrialisation (Asie, Moyen-Orient, Afrique du Sud, Inde…).

Un dysfonctionnement du système immunitaire

La qualité du microbiote intestinal jouerait un rôle important dans le développement des MICI. Sa composition, sa diversité et sa fonctionnalité dépendent de facteurs génétiques, environnementaux et alimentaires. Un déséquilibre du microbiote, appelé dysbiose, peut favoriser et maintenir l’inflammation. Face aux bactéries de l’intestin, le système immunitaire réagit anormalement, de manière disproportionnée, entraînant une inflammation de la paroi intestinale.

Comment poser le diagnostic de MICI ?

Le diagnostic est établi sur un ensemble de données cliniques. Lors d’une poussée, le professionnel de santé interroge son patient sur l’ensemble de ses symptômes. Il demande ensuite la réalisation de plusieurs examens afin de confirmer le diagnostic :

  • un bilan biologique comprenant des analyses de sang (dosage sanguin de la protéine CRP) et une analyse des selles (recherche de calprotectine, une protéine augmentée en cas d’inflammation) ;
  • une endoscopie digestive pour rechercher la présence et la localisation de lésions spécifiques du tube digestif et les prélever ;
  • une entéro-IRM ou une vidéo capsule ingérée pour visualiser finement le tube digestif.

D’autres examens pourront être réalisés au cas par cas : endoscopie oesogastroduodénale, entéro-scanner et scanner abdominopelvien, échographie abdominale…

Quels traitements mettre en place ?

À ce jour, il n’existe pas de traitement curatif pour ces maladies. La prise en charge des MICI comprend la mise en place de règles hygiéno-diététiques et de traitements anti-inflammatoires visant à contrôler la durée de la maladie, la fréquence et l’intensité des poussées.

Les règles hygiéno-diététiques

Avant la mise en place de tout traitement, le Dr Tournier insiste sur l’importance des règles hygiéno-diététiques :

  • la lutte contre le stress chronique (sommeil, activité physique, yoga, méditation, sophrologie…) ;
  • la mise en place d’une alimentation diversifiée et équilibrée pour lutter contre la dénutrition et les carences alimentaires ;
  • le sevrage tabagique pour les personnes touchées par la maladie de Crohn, car sa consommation aggrave l’intensité des poussées et favorise l’apparition des complications.

Les traitements médicamenteux

Les traitements de la rectocolite hémorragique et de la maladie de Crohn ne sont pas forcément les mêmes et sont prescrits au cas par cas. Le traitement des poussées, par exemple, impliquera :

  • des corticoïdes à l’action anti-inflammatoire puissante, prescrits en cures courtes ;
  • de l’azathioprine, prescrit aux patients qui ne répondent pas aux corticoïdes.
En guise de traitement de fond, les professionnels de santé proposeront une biothérapie immunomodulatrice ou immunosuppressive pour atténuer les réactions immunitaires de l’organisme et réduire l’inflammation.

Enfin, pour traiter les complications, on pourra recourir à :

  • des antibiotiques en cas de complications infectieuses ;
  • par voie orale ou en perfusion en cas d’anémie ;
  • une chirurgie, toujours en dernière intention, lorsque la maladie persiste malgré la mise en place d’un traitement ou quand des complications surviennent.

Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin : la recherche avance

Voici les pistes à l’étude :

  • Le rôle de l’alimentation transformée et l’impact de certains additifs alimentaires. À leur contact, le pouvoir pathogène de certaines bactéries et le risque d’inflammation intestinale sont multipliés. Les chercheurs souhaitent lister ces bactéries.
  • La transplantation fécale ou encore la greffe fécale autologue pour rééquilibrer le microbiote intestinal, en particulier pour les patients souffrant de rectocolite hémorragique.
  • La création de probiotiques génétiquement modifiés permettant d’implanter des bactéries aux propriétés supplémentaires dans le microbiote.
  • De nouveaux médicaments plus performants.
  • Diverses approches de thérapie cellulaire pour rééduquer le système immunitaire du patient et le rendre moins inflammatoire.

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